En s’intéressant aux guitares mythiques des années 60 et 70, Hugues Jacob est devenu un de ces spécialistes qui consacrent leur temps et leur énergie à l’objet précis et ciblé de leur recherche. C’est pointu !!
Devenu luthier en guitare électrique, il a sa juste place chez les artistes auxquels Pegase-21 s’intéresse, car il est capable de fournir au musicien le plus exigeant, le son exact qu’il désire !
Quant au soin qu’il apporte à la fabrication, la réparation ou l’entretien d’une guitare, dans le soucis du détail historique, c’est du grand art !!!!
A quel moment est née cette passion pour les guitares ?
J’ai d’abord été passionné par la musique. Mes premiers émois musicaux ont été Les Beatles. J’écoutais les doubles albums bleus et rouges sur une cassette que mon cousin Philippe m’avait enregistré.
Il y avait aussi des disques à la maison et en particulier un vinyle d’AC/DC « Highway To Hell« . Et puis j’avais un « Tonton » musicien qui avait joué dans plusieurs groupes comme Kingstones, Médium ou Ponce Pilate et qui m’a appris à accorder ma première guitare.
Tu as joué dans un groupe ?
J’ai commencé à jouer avec des potes de lycée, notamment avec Grégory Hocquet. Je devais avoir 16 ans. Grégory jouait de la guitare, il avait une Lâg et moi je jouais de la basse.
Ma première basse était une Épiphone, puis j’ai eu une Aria Pro II japonaise, mais avec Grégory, j’avais une Peavey T40 avec un excellent son mais qui pesait le poids d’un âne mort !
Puis vers 18 ans, on a commencé à faire les choses un peu plus sérieusement en répétant les dimanches et en commençant à faire des compos. C’est ainsi qu’est né Indian Spirit.
Qui étaient les musiciens d’Indian Spirit ?
Il y avait Arnaud Houzé aux claviers, Mickaël Baroche à la guitare et Stéphane Lebègue au chant. Et moi, toujours à la basse. Pour la batterie, c’était plus compliqué et il y en a eu plusieurs. Le dernier était Fabrice Cornille avec qui j’ai joué ensuite en trio sur Lille.
C’est à ce moment que j’ai acquis ma Fender JazzBass de 1973 qui ne m’a pas quittée depuis !
Fabrice est maintenant le batteur du groupe Glowsun qui s’est forgé une bonne réputation internationale dans le monde du Stoner Rock. Il est aussi brasseur et à créé sa bière la Brasserie du Tambour à Villeneuve d’Ascq.
Quel était votre répertoire ? Des reprises ou des compositions personnelles ?
Pour commencer, on a fait quelques reprises notamment des Doors et de U2 mais aussi Deep Purple (Smoke On The Water), ZZ Top (La Grange), Gun’s N Roses (Sweet Child O’Mine), Les Beatles (Paperback Writer) …
Puis rapidement on a créé nos propres compositions. On avait 8 morceaux, fortement influencés par le côté psychédélique rock des Doors.
C’est le seul groupe dans lequel tu as joué ?
L’aventure a duré deux ou trois ans puis chacun a pris des chemins différents avec les études supérieures notamment et pour certains un début de vie de couple.
J’ai joué avec un ou deux groupes sur Lille notamment avec Fabrice Cornille, le dernier batteur d’Indian Spirit dont j’ai déjà parlé, mais cela n’a jamais dépassé le stade des répétitions.
Comment as tu commencé à t’intéresser aux guitares ? qui t’a aidé, encouragé ?
Après mes études dans le Nord, j’ai commencé à travailler sur Paris mais ne connaissant pas de musiciens sur la région parisienne, accaparé par ma vie professionnelle et la naissance de ma première fille May, je n’avais plus de temps pour faire de la musique sérieusement.
Mais en fréquentant les magasins de guitares parisiens, j’ai commencé à m’intéresser aux instruments vintage qui faisait résonance aux groupes des années 50 à 70 que j’écoutais beaucoup, Led Zeppelin, Deep Purple, the Doors…
C’est ainsi que j’ai commencé à me documenter sur les guitares vintage mais leur prix était très élevé (on était à la fin des années 90).
J’aimais beaucoup le travail du bois auquel mon père m’avait initié et je le remercie pour cela. J’ai donc commencé à créer ma première réplique de guitare vintage : une Telecaster Custom 70’s que j’ai assemblé avec des éléments achetés sur le net et que j’ai customisé. La passion était née.
Comment es-tu arrivé à faire de cette passion un métier ?
Après une vie professionnelle tournée vers la grande distribution et à l’aube de ma cinquantaine, l’idée de professionnaliser la création de mes guitares me triturait le cerveau.
Le déclic s’est fait après une série de rencontres avec des musiciens professionnels qui m’ont donné confiance en moi quant à la qualité de mes instruments, car je suis un autodidacte.
C’est ainsi que j’ai franchi le pas ! D’un coté, il y avait un raz-le-bol de la grande distribution et de l’autre l’encouragement de professionnels, notamment Tibault Ripault et surtout Nico Duportal dont on reparlera plus loin.
C’est début 2019 que je crée la société Jacobson Vintage Guitars, avec un logo que l’artiste graphiste Nikonografik avait déjà créé plusieurs années auparavant. C’est dire que c’était l’aboutissement d’un long cheminement.
Pourquoi cette passion pour cette période ?
Ce qui me passionne dans la création de mes guitares c’est d’essayer de retrouver les techniques, les matériaux des années 50 à 70, pourquoi ces années ? Parce qu’elles sont liées à une certaine douceur de vivre et surtout rattachées à beaucoup de musiciens et groupes que j’adore toujours. C’était une période très riche musicalement parlant : la redécouverte du blues, le Hard rock, le funk, la soul…
Les très nombreux guitare-héros de cette période étaient Jimmy Page, Jimi Hendrix, Ritchie Blackmore, Tony Iommi, Eric Clapton…
Mais surtout pour ce qui est des instruments c’est tout de même un certain âge d’or. On est au début d’un processus industriel mais avec une grande part d’intervention humaine ce qui en fait des instruments d’exception.
C’est ce challenge qui m’intéresse : trouver la recette qui en fait des instruments d’exception et essayer de les reproduire pour que les musiciens y trouvent tout ce qu’ils aimeraient trouver dans un instrument vintage avec un coût abordable.
Pour la fabrication de tes instruments, qu’est-ce qui est le plus important pour toi ? Le son ? L’esthétique ?
Ce qui a de l’importance dans mes instruments c’est avant tout l’esthétisme car je cherche à reproduire aussi le vieillissement des instruments. C’est ce qui fait ma marque de fabrique.
Mais c’est un tout, le son doit être à la hauteur de l’esthétisme, de même que le confort de jeu. Ce ne sont pas des objets de décoration mais des instruments faits pour être joués par des pros qui plus est, avec l’exigence qui les caractérise.
C’est d’ailleurs pour ça que j’ai développé avec Nico Duportal ma propre gamme de micro pour trouver le son qui convient à mes instruments. Ces micros sont, tout comme mes instruments, réalisés en utilisant les matériaux et des techniques les plus proches possible de l’époque concernée.
Chaque micro est réalisé entièrement à la main ce qui leur donne une dynamique et un spectre qu’on ne retrouve pas sur les micros réalisés en série et cela me permet aussi de coller au son désiré par les musiciens.
Tu collabores avec de nombreux musiciens, des musiciens que tu aimes, qui utilisent tes guitares, peux-tu nous en présenter quelques uns ?
Parmi les musiciens que j’aime et avec qui j’ai travaillé ou je travaille encore il y a en tout premier TBo Ripault, c’est un guitariste très talentueux qui officie dans de nombreuses formations, il habite du côté de Bordeaux et travaille actuellement avec Théo Lawrence.
C’est le premier pro qui m’a commandé deux guitares, une type Telecaster et une type Stratocaster. Très doué dans le blues, la country, la soul, le rock 50’s ou même le jazz, c’est un jeune guitariste à suivre de près.
Le deuxième avec qui j’ai travaillé c’est Mig Toquereau, qui est bassiste, accompagnateur dans diverses formations, et guitariste au sein de son propre groupe actuel Tiger Rose. Mig m’a commandé une réplique de Precision Bass 1954.
Puis Tbo Ripault m’a présenté Nico Duportal. Nico est un des meilleurs guitaristes de blues français avec qui je travaille depuis maintenant presque 3 ans et à qui j’ai fabriqué 3 guitares : une type Telecaster, une type Jazzmaster et la petite dernière une type ES 330 sur laquelle j’ai installé des vieux micros DeArmond Goldfoil de 1964 que Nico avait en stock.
C’est une de ses deux guitares principales (l’autre étant une Telecaster 52 que j’ai aussi réalisée) qu’il utilise dans son projet actuel Lowland Brothers, dont l’album vient de sortir.
Je m’occupe aussi du réglage de toutes ses guitares, et grâce à son oreille avisée et surtout à sa connaissance des instruments vintage (car il en a souvent eu entre les mains, notamment aux US où il a pas mal tourné) j’ai développé ma gamme de micros. Mais dès que je travaille sur un nouveau modèle, c’est mon principal conseiller technique et surtout c’est à lui que revient la primeur des premiers essais qui me permettent d’éventuels corrections.
Nico m’a permis de m’introduire sur la scène blues/soul de Nantes qui est une des plus actives en France à l’heure actuelle. Dans les rencontres qu’il m’a permis de faire, il y a notamment le multi instrumentiste Max Genouel. C’est le leader des Freaky Buds au chant et à la guitare mais c’est aussi un accompagnateur hors pair à la basse et à la contrebasse.
© Thierry Wakx
J’ai fabriqué pour Max une réplique de Stratocaster 57 et une réplique de Precision bass 51. Il joue avec sa Strato au sein des Freaky buds et avec sa Precision Bass avec Nico dans les Lowland Brothers.
La vidéo qui suit est un morceau de Lowland Brothers avec Nico Duportal au chant et à la guitare Jazzmaster Jacobson, Max Genouel est à la basse avec une Precision Bass 51 Jacobson, Hugo Deviers avec une ES 330 Jacobson. Fabrice Bessouat est à la batterie et Mathieu Burgot aux claviers .
© Video Julien Dubois pour STUD PROD
Mix et Mastering : Pierre Le Gac
pour LE GARAGE HERMETIQUE
Entre-temps j’ai aussi travaillé pour Bone Tee à qui j’ai fabriqué une réplique de Telecaster 1952 qui est le chanteur guitariste de Bone Tee & the Swing Moods.
Peux-tu nous présenter quelques modèles de guitares que tu as fabriquées ?
Le modèle que je fabrique le plus c’est la Telecaster, que j’appelle Tonecaster. Je m’inspire des modèles de 1952 et avant. Lles corps sont en une ou deux pièces de Swamp Ash léger, le manche en érable une pièce, la finition est en vernis nitrocellulosique.
J’adapte le vieillissement en fonction des souhaits des clients. En ce qui concerne les micros, Je les fabrique maintenant en suivant les spécifications des années concernées, soit Broadcaster (ancêtre de la Telecaster), soit Telecaster 52 ou Telecaster 54.
Un autre modèle qui fonctionne bien en ce moment c’est la réplique de la Gibson ES 330 de 1964. Corps complètement creux, manche en acajou avec touche en palissandre et repère rectangulaire. La finition est en vernis nitrocellulosique.
Les micros P90 sont entièrement réalisés à la main à l’atelier en suivant les spécifications de l’époque (fils et aimants).
Un autre grand classique : la stratocaster, que j’appelle la Soncaster. Manche en érable une pièce ou avec une touche en palissandre, corps en frêne des marais (Swamp Ash) ou aulne (Alder) finition en vernis nitrocellulosique, micros réalisés à la main à l’atelier.
As-tu des projets particuliers pour 2022 ?
Oui, il y aura l’aménagement d’un nouvel atelier dans ma nouvelle maison de Rieulay, une fermette en cours de rénovation.
Pegase-21 te souhaite beaucoup de réussite et de nombreuses rencontres avec de nouveaux musiciens.